Trois sénateurs, dont Sébastien Pla (Aude) et Henri Cabanel (Hérault), mènent depuis avril une mission sur l’avenir de la filière viticole nationale. Les 4 et 5 septembre, ils se sont rendus dans l’Hérault et l’Aude pour rencontrer vignerons, coopératives et organisations professionnelles, au cœur d’un secteur confronté à de nombreux défis économiques et climatiques.
La commission des affaires économiques du Sénat a lancé une mission pour analyser l’avenir de la filière viticole française. Trois rapporteurs ont été nommés : Sébastien Pla (Aude), Daniel Laurent (Charente-Maritime) et Henri Cabanel (Hérault).
“Le but est d’auditionner tous les acteurs de la filière, de l’amont à l’aval, pour dresser un constat précis, identifier les difficultés et formuler des recommandations“, explique Henri Cabanel. Outre les auditions au Sénat, les rapporteurs se déplacent dans les régions viticoles pour rencontrer responsables, professionnels et viticulteurs. Après la Bourgogne, c’était au tour de l’Hérault et de l’Aude les 4 et 5 septembre, notamment Limoux et les Corbières, touchées par l’incendie historique qui a ravagé plus de 16 000 hectares.
“Nous avons discuté longuement de la situation de Limoux, avant de nous rendre à Narbonne pour rencontrer les organisations professionnelles. Nous avons malheureusement traversé l’incendie qui a frappé l’Aude“, rapporte Henri Cabanel.
“Travailler ensemble pour conquérir les marchés à l’export”
Dans l’Hérault, les sénateurs ont été accueillis sur les terres des vins de pays d’Oc pour rencontrer les vignerons indépendants, les coopératives, la chambre d’agriculture, les syndicats agricoles et les acteurs du négoce du département. Les viticulteurs ont exprimé leurs difficultés sociales et économiques, notamment après une année marquée par de faibles rendements et un contexte climatique difficile.
Selon Henri Cabanel, la situation est très hétérogène au sein même du territoire. “Les entreprises qui prennent de la hauteur et élaborent une stratégie par rapport à la situation économique et au changement climatique s’en sortent, les autres rencontrent des difficultés. Il faut que la viticulture française sache travailler ensemble pour conquérir les marchés à l’export, à l’image de nos concurrents européens”, estime le sénateur, qui constate une baisse de la consommation en France et au niveau mondial. “Il faut qu’on se donne les moyens financiers de commercialisation et de communication qui mettent en avant l’image des vins français.”
L’adaptation au changement climatique est aussi un enjeu central. “Les viticulteurs du Sud souffrent de plus en plus de la chaleur et du manque d’eau. Nous pouvons financer l’irrigation, mais à condition qu’ils reconstituent leurs sols pour limiter l’évapotranspiration“, explique Henri Cabanel qui pense que des contreparties doivent être respectées en cas d’aide publique. Car selon lui, “l’Etat met beaucoup de moyens et d’argent publique mais il y a peu de résultats”.
Arrachage, renouvellement des cépages et diversification des activités
Parmi les acteurs rencontrés le 4 septembre, Jean-Marc Touzard, directeur de recherche à l’Inrae, a présenté les cinq défis majeurs pour la viticulture occitane : lutte contre les maladies, adaptation au marché face à la baisse de consommation, affirmation sociale dans un contexte de crise socioprofessionnelle, préservation de l’environnement et adaptation au changement climatique.
Il a également proposé cinq pistes pour renouveler le vignoble : arrachage et renouvellement avec des cépages résistants, réduction de certaines surfaces, diversification des activités, développement de nouveaux marchés du vin et révision des soutiens publics.
Un rapport rendu fin octobre
Interrogé sur l’impact d’un tel rapport, Jean-Marc Touzard répond qu’il a “toujours en mémoire le rapport sénatorial César il y a une vingtaine d’années qui a servi de référence au moment des discussions sur l’engagement dans la mondialisation des vins français”. Même si “d’autres ont certainement été enterrés dans des placards”.
Le rapport final, attendu fin octobre, devrait proposer des mesures concrètes pour sécuriser l’avenir de la viticulture française. “Nos propositions consisteront à trouver le bon équilibre, le bon compromis acceptable par tous afin de faire des propositions cohérentes pour cette filière nationale en prenant en compte la spécificité de chaque territoire”, anticipe Henri Cabanel. Une lourde tâche.
Thea Ollivier
Photo : la mission est passée par les paysages viticoles des Corbières dévastés par l’incendie de début août. ©A.G.