Pierre Richard : « Je me suis inspiré des personnages incroyables de Gruissan » 

access_time Publié le 27/08/2025.

Figure incontournable du cinéma français et Gruissanais d’adoption, Pierre Richard présente “L’homme qui a vu l’ours qui a vu l’homme”, son dernier film tourné dans les paysages du littoral audois. Une pellicule très personnelle où le spectateur est plongé dans un univers jouant sur un fil entre burlesque et mélancolie. Sortie en salle le 17 septembre. 

“Droit dans le mur”, votre dernier film derrière la caméra, remonte à 1997. Qu’est-ce qui vous a donné envie de vous replonger dans la réalisation 30 ans plus tard ? 
C’est toujours un peu la même chose. Je ne me suis pas dit un beau matin “tiens, je vais faire un film”. Non, ce n’est pas ça. Pour réaliser un film, il faut déjà le créer et avoir des choses à dire.  Voilà 40 ans que je vis à Gruissan, où j’ai ma maison et pendant 40 ans, j’ai évidemment connu le village mais aussi les gens qui sont tellement cocasses, drôles, imprévisibles. J’en profitais moi, mais je ne pensais pas en faire profiter les autres. Puis un beau jour, je me suis dit “je vais écrire une histoire”. Peut-être même  plus pour un livre où je parlerai de leur caractère incroyablement drôle. Mais ça ne suffisait pas pour faire un film. Puis, j’ai rencontré une amie qui m’a soufflé un personnage. Et à partir de là, j’ai réussi à faire la jonction entre moi dans le film et les gens du pays qui restent incontournables. 

 Parce que, pour moi, il faut une idée forte sinon je ne fais pas de film. D’autant que quand on est réalisateur et qu’on joue en même temps, c’est une sacrée différence entre simplement jouer ou simplement être réalisateur. Je me levais plus tôt que tout le monde et je me couchais le plus tard. 

Vous avez fait appel à beaucoup de comédiens locaux ou du moins du Sud, c’était une volonté forte de votre part ? 
J’ai eu beaucoup de comédiens du Sud parce que je ne voulais pas, pour jouer mes fameux personnages occitans, des comédiens parisiens qui parlent avec un faux accent. Ces comédiens jouent sincèrement, ils jouent juste et avec un accent parfait, c’est-à-dire le leur. Donc, je n’ai pas pris beaucoup de comédiens parisiens, à part deux ou trois, dont moi. Mais je ne joue pas le rôle d’un Gruissanais, on n’y croirait pas. 

“C’est peut-être mon film le plus personnel” 

Pierre Richard

Vous parlez de Gruissan, vous filmez ces lieux quasiment comme s’ils étaient un personnage à part entière. C’était voulu dès le départ ou ce sont ces paysages qui se sont imposés à la caméra et sont devenus incontournables au cours du tournage ?  
J’habite juste devant l’étang de l’Ayrolle. Je le connais très bien au mois de juillet, d’août et de septembre. Mais là, j’ai tourné en octobre-novembre. Donc, je l’ai aussi redécouvert. Ce n’était pas le même temps, pas le ciel bleu en permanence. Et c’était encore plus beau. Parce que finalement, il n’y a rien de plus bête qu’un ciel bleu, toujours bleu. Tandis que là, j’avais des nuages, j’avais des soleils qui passaient à travers les nuages. C’est plus joli. C’est la première fois aussi que j’ai pris mon temps. Et surtout, j’avais un grand chef opérateur. Pendant huit jours, je lui ai montré tous les endroits où je voulais tourner. Il était en extase, parce que quand on ne connaît pas, c’est beau : l’Ayrolle avec les montagnes en arrière-plan, la garrigue, enfin tout ça, c’est joli. Alors, évidemment, il ne faut pas prendre ça pour un documentaire. Je me suis inspiré de personnes incroyables de Gruissan mais après je me suis permis aussi d’inventer des scènes. Ce n’est pas un documentaire sur des villageois. 

Pierre Richard a sublimé Gruissan et l’étang de l’Ayrolle dans son dernier film. ©Pauline Maillet

Ce n’est pas un documentaire mais comment le qualifier ? C’est un film comique ? Un beau film ? Un film mélancolique ?  
Un peu de tout ça !  C’est un film comique-mélancolique. C’est un film qui parle d’écologie aussi puisque c’est un type qui regrette beaucoup d’avoir exploité des forêts. C’est également un film profond… C’est peut-être mon film le plus personnel. Parce que je ne suis pas qu’un acteur burlesque. Et surtout, en prenant de l’âge, on raconte une histoire mais avec plus de gravité. Ça ne m’empêche pas la drôlerie.  

Et ce n’est pas compliqué justement de trouver le juste équilibre ? 
De toute façon, c’est toujours compliqué d’écrire un scénario. Dans le film, on voit tous mes rêves. Toutes les extravagances dans lesquelles j’aurais voulu être. 

“Les flammes, je les ai vues de ma fenêtre” 

Pierre Richard

Un petit point d’actualité : vous avez parlé de votre personnage qui regrette son passé dans lequel il a exploité de façon malsaine les forêts. Les Corbières ont été victimes d’incendies dramatiques cet été, vous portez quel regard sur ce terrible épisode ? 
Les flammes, je les ai vues de ma fenêtre. Je n’ai pas été menacé mais, de ma fenêtre, je voyais du côté de Narbonne, cette fumée rouge. C’était épouvantable. Tout était bloqué. C’est une tragédie. Quand on perd sa maison on ne perd pas seulement des murs mais on perd toute sa vie, ses souvenirs. Et il y a une chose qui m’a aussi frappé, c’est l’épouvante des animaux qui sont morts dans ce brasier. Tout ça, c’est dû à des connards. Il faut bien le dire. Dernièrement, j’ai encore vu un automobiliste avec son bras qui dépassait de la voiture et une cigarette au bout de la main… C’est un connard. 

En parlant des animaux, certaines associations dénoncent la présence dans votre film d’un ours dressé… Ces critiques vous ont touché ? 
C’est trop con. C’est trop bête. Si vous voyez l’ours avec son maître… Pendant les pauses, j’ai vu le maître dormir sur son ventre. S’ils avaient eu des rapports agressifs de dresseurs avec un fouet, j’aurais compris la polémique. Mais là…  Je les ai vus s’embrasser, je n’ai jamais vu le maître dur avec son ours. Au contraire, il y avait presque une paternité. On n’est pas avec un tigre qu’on fait sortir de sa cage à coups de fouet pour faire deux numéros et qu’on renvoie dans sa cage avec le même fouet. Bref, je n’ai pas envie de polémiquer.   

Vous avez dit récemment que c’était votre dernier film en tant que réalisateur  parce que vous vous sentiez affaibli… 
Je n’en finis pas d’entendre parler de ce sujet. J’ai dit que j’étais “affaibli” parce que mon genou fatigue un peu en ce moment. Mais je fais toute la promotion, tout en jouant au théâtre en même temps… Je ne suis pas si affaibli que ça (rire). Mais qu’est-ce que vous voulez que je réponde ? Ça fait aussi plusieurs fois qu’on annonce ma mort. J’ai l’habitude maintenant. D’ailleurs, je suis le seul à avoir cet avantage :  j’ai pu lire, sur les réseaux sociaux, les réactions à ma mort !  

Propos recueillis par Arnaud Gauthier 
Photo principale : Pierre Richard campe le personnage d’un industriel du bois repenti, venu retrouver des valeurs à Gruissan. ©Pauline Maillet

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