Le Grattou, l’ami des trufficulteurs

access_time Publié le 01/03/2021.

Voilà cinq ans maintenant que, dans son petit village du Haut-Cabardès, Alain Samama a inventé cet objet pratique et esthétique : le Grattou.
Idéal pour gratter la terre et chercher des truffes.
Les spécialistes lui disent merci.

Aujourd’hui, cet ancien ouvrier du textile fourmille d’autres idées.

En dehors d’être inventeur, quelle est (ou était votre activité ?
Je travaille depuis l’âge de 16 ans. Pendant 25 ans, j’ai été ouvrier dans une usine textile (teinture).
Je suis également plombier-chauffagiste. J’ai toujours aimé les métaux et la soudure, le bois aussi. Je suis un manuel et j’aime travailler seul dans mon atelier.
J’aime la liberté et je trouve très valorisant de travailler pour soi-même, en prenant le temps de réfléchir sur les objets que l’on va concevoir.
Certains disent que je suis artiste. Ma femme et mes amis sont mes meilleures supporters.

Comment vous est venue l’idée de fabriquer un objet destiné à récolter la truffe ?
La Montagne Noire, sans être une grande région trufficole comme le Périgord a toujours produit de la truffe à l’état sauvage. Depuis quelques années, des élus ont soutenu la mise en culture des chênes truffiers. Enfant, je partais souvent en forêt à la cueillette des cèpes avec mon père et les champignons m’ont toujours intéressé. Mais la truffe c’est un peu magique et envoûtant.
Lorsque les premiers marchés aux truffes de l’Aude se sont mis en place je m’y suis rendu un peu par curiosité pour assister à ces ventes intrigantes. Je me suis aperçu que sur les marchés il n’y avait pas d’outils destinés au cavage.
Sur internet il n’y avait que deux fabricants qui concevaient ce genre d’objet . L’idée m’est alors venue de fabriquer un outil spécial pour les trufficulteurs sans y croire vraiment.
J’ai d’abord commencé par une tige en fer à deux fonctions : un côté un peu incurvé pour gratter la terre sans blesser le champignon souterrain et un côté plus pointu pour écarter les pierres et plonger plus en profondeur. C’était un objet simple.

«On ne doit pas compter son temps»

Puis vous vous êtes pris au jeu…

Un ami m’a conseillé de faire un manche en bois. Je suis parti dans la colline derrière chez moi en quête de jolies essences d’arbre. J’ai ramené de l’olivier, du cade, du buis, du châtaignier puis cet ami m’a donné des morceaux d’ébène et du teck.

Les premiers outils étaient plus petits. Puis je me suis perfectionné. J’avais fais ma place sur les marchés trufficoles audois et les clients venaient voir cet outil par curiosité (il faut dire que son nom attirait l’attention et le stand était sympa). Bien sûr, ce sont les trufficulteurs qui sont devenus mes principaux acheteurs. A les écouter leur «Cavadou» n’était qu’un objet usuel sans vraiment de «classe». Ils ont flashé sur les manches en bois d’olivier, mais le cade a eu beaucoup de succès aussi.

La trufficulture est-elle très présente dans le Haut-Cabardès ?
Le Haut-Cabardès n’est pas trufficole, c’est surtout le Cabardès sur le piémont de la Montagne Noire et le Minervois qui produisent la truffe. Les terres du Haut-Cabardès sont plus schisteuses ou granitiques, ce qui n’est pas propice à son développement. La Maison de la Truffe à Villeneuve Minervois explique bien tout cela. J’ai d’ailleurs quelques outils chez eux en vente.

Combien de temps a été nécessaire pour présenter un objet fini ?
Si on veut faire un outil réussi on ne doit pas compter son temps. Il faut s’occuper de la forge, puis travailler l’outil jusqu’à ce que je puisse lui donner la forme idéale – c’est beaucoup de coup de marteaux sur l’enclume ! c’est un travail d’hiver, ça réchauffe. Puis il faut choisir son bois, le dimensionner, le poncer, le fuseler, l’adapter et en sortir sa plus belle représentation pour que l’objet soi esthétique mais aussi – beau – Car le manche donne le rendu. Ensuite, il faut adapter solidement le manche sur la partie en fer.

«Ils sont ravis de l’outil tel qu’il est»

Que vous inspire le Grattou quand vous le regardez ?
J’aime mon outil car il donne l’impression d’être un outil ancien. Certains collectionneurs d’outils en on fait l’acquisition sans être trufficulteurs. Quel plaisir de rencontrer maintenant en balade un trufficulteur sortant de sa poche un Grattou de ma fabrication !

Justement, avez-vous été conseillé par des trufficulteurs ?
Oui, certains trufficulteurs m’ont commandé des formes un peu différentes mais généralement ils sont tous ravis de l’outil tel qu’il est. Certains d’entre eux en ont acheté plusieurs. Une envie de se faire plaisir. Et puis il y a ceux qui les perdent ou les oublient dans la truffière. C’est arrivé souvent. Et enfin les cadeaux pour un ami, un père ou un mari. Il y a deux ans j’en ai fabriqué en couleurs pour qu’ils puissent les retrouver. Le manche est en résine (rouge, vert, bleu, violet) Ils sont très beaux aussi mais le bois a toujours la préférence. J’en ai fabriqué aussi en molaire de mammouth de Sibérie !

Avez-vous hésité entre plusieurs noms avant de l’appeler le Grattou ?
Le nom ! Oui, le Cavadou c’est le nom traditionnel mais je voulais trouver quelque chose de marrant et qui corresponde à sa fonction. Avec Christine mon épouse, nous avons parlé de çà et un jour Le Grattou nous est venu ! Nos clients l’appellent le Grattou. C’est drôle.

L’investissement financier et humain valait-il le coup au final ?
L’investissement, c’est surtout le temps qui j’y passe car la matière première n’est pas très coûteuse. Bien sur il y a le charbon de forge, le fer, le petit matériel. J’aime ça donc quand on aime on ne compte pas. Mais j’aimerais toucher des trufficulteurs en dehors de la région pour me faire connaître et renouveler ma clientèle maintenant car le Grattou est inusable. Certains sont partis en Suisse, en Espagne et d’autres régions de France mais ce n’est pas suffisant. J’aime bien les marchés car on se rencontre et j’ai des avis.

Quel retour avez-vous eu de la part des spécialistes de la truffe ?
Franchement, les avis ont tous été positifs. Pour l’utilisation qui est plus fonctionnelle qu’un tournevis ou autre et aussi pour l’esthétique. Philippe Clergue, le maire de Cabrespine est un de mes meilleurs clients. Demandez lui son avis ! J’ai des clients (dont il fait partie) qui m’amènent leur bois (le cade de mon père, l’olivier centenaire de mon oncle…) qui aimeraient bien que ce bois-là se perpétue à travers l’ outil.

Et maintenant le «Pif-Truffe»

Le Grattou a-t-il des vertus par rapport aux couteaux, cuillères, etc… ?
Des vertus sans doute puis qu’ils y sont presque tous venus et revenus. Ce sont tous des pièces uniques. Avec le chien truffier ils sont les compagnons idéaux du trufficulteur.

Cinq ans après, quel regard jetez-vous sur votre invention ?
Une invention, c’est toujours marrant car ça part de rien, ça te fait rencontrer un tas de gens passionnés et on ne sait jamais si l’objet va plaire. j’ai gagné un peu, j’ai pris confiance en moi en me disant : « qui ne tente rien n’a rien ».

Depuis, avez-vous inventé d’autres objets dans votre atelier des Ilhes ?

Oui, j’ai fait des couteaux droits en acier et depuis deux ans du Damas. Il y a plein de collectionneurs de couteaux et je crois qu’il y a un marché. Le Grattou pour la truffe, le couteau de poche pour le casse croûte. J’aime l’innovation et je vais effectuer un stage dans quelques semaines chez un des derniers taillandiers. C’est dans la Montagne Noire. Je veux apprendre à faire correctement des couteaux pliants et me perfectionner avec ce métier. Je conçois aussi des kits de dressage pour les chiens : une boîte en bois dans laquelle on glisse le parfum de la truffe : «Pif Truffe».

Le site internet :
www.grattoutruffes.yolasite.com

Illustration
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