Département : la hausse de l’endettement inquiète, la présidente Sandragné répond

access_time Publié le 16/07/2025.

Dans son dernier rapport, la Chambre régionale des comptes s’inquiète de la tendance fortement haussière du taux d’endettement porté par le Département. Hélène Sandragné replace les chiffres dans le contexte économique imposé.

Dans un contexte de concertation nationale sur la trajectoire des finances locales, la chambre régionale des comptes (CRC) d’Occitanie alerte sur la situation préoccupante du Département de l’Aude. Un rapport publié le 1er juillet 2025 dresse un constat sec : entre 2022 et 2024, les principaux indicateurs financiers se sont nettement détériorés, et cette tendance devrait se prolonger en 2025, malgré des efforts pour contenir les dépenses. La capacité de désendettement passe de 3 ans en 2022, à 8 ans en 2025. Le seuil d’alerte n’est pas encore franchi, le plafond recommandé étant de 10 ans, mais la tendance est clairement inquiétante.

Une dynamique financière inversée depuis 2022

Jusqu’à la fin de l’année 2022, le Département de l’Aude bénéficiait d’une amélioration progressive de ses indicateurs, notamment en matière de capacité de désendettement. Le nerf de la guerre. Mais cette dynamique s’est brusquement inversée : en deux ans, la capacité d’autofinancement nette a été divisée par cinq.

Cette contraction sévère trouve son origine dans une double pression sur les comptes publics : la baisse des produits d’une part, et une augmentation marquée des charges de l’autre. Parmi ces dernières, les aides sociales directes et indirectes constituent le principal facteur aggravant. Un transfert de compétences de l’État vers les Départements qui n’a pas toujours été suivi des compensations financières attendues (RSA). La prise en charge des publics vulnérables (enfance, personnes âgées, handicap, précarité) s’est traduite par une forte sollicitation des finances départementales. D’autant que parmi les 380 420 Audois, le pourcentage de personnes précaires est bien au-dessus de la moyenne française. Troisième département le plus pauvre de France, l’Aude affiche également le troisième taux de chômage le plus fort du pays (10,4%). Pas étonnant dans ces conditions que l’action sociale représente 72% des dépenses de la collectivité.

La présidente dénonce cette situation depuis plusieurs mois

Le constat dressé par la chambre régionale des comptes, la présidente du Département le partage. Hélène Sandragné avait d’ailleurs élevé la voix lors de la présentation du budget 2025. Dans les colonnes de L’Écho du Languedoc, elle dénonçait déjà, l’absence d’autonomie des Départements français qui font face à des dépenses sociales imposées en contrepartie de recettes profondément liées à la situation économique. Et donc, par définition, changeantes et peu maitrisables. Son avis n’a pas évolué à la lecture du rapport : « Ce rapport ne nous apprend pas des choses que nous ne savions déjà mais objective une situation que nous vivons au quotidien et qui nous conduit à faire des choix compliqués mais nécessaires lors du montage du budget. Cela a été le cas pour le budget 2025 et malheureusement, si le gouvernement n’apporte pas de solutions (et il n’a pas l’air de le vouloir) pour les budgets des années à venir. »

Une inflation salariale portée par les décisions locales

Il faut tout de même noter que les dépenses de personnel ont également contribué à la dérive identifiée par la CRC. Si une part significative des revalorisations salariales découle de mesures nationales (Ségur de la santé, revalorisation du point d’indice, hausse du Smic), des hausses résultent directement de choix propres à la collectivité. Celle-ci a notamment instauré une revalorisation des primes pour les agents non concernés par le Ségur et a décidé d’indexer le régime indemnitaire sur l’inflation, alourdissant d’autant la masse salariale.

Pour contenir cette érosion de l’autofinancement, le Département a dû restreindre ses investissements et mobiliser d’importants leviers financiers : 30 millions d’euros ont été empruntés, et 53,7 millions ont été puisés dans les réserves. Si les seuils d’alerte n’étaient pas franchis à fin 2024, tous les indicateurs étaient orientés à la baisse.

Un équilibre budgétaire 2025 obtenu au prix d’une forte contraction

Malgré cette dégradation, le Département a adopté pour 2025 un budget primitif présenté à l’équilibre. Cet objectif a été atteint grâce à une volonté manifeste de contenir les charges, notamment en plafonnant l’évolution des aides sociales. L’Aude a également choisi de s’engager dans une expérimentation visant à fusionner les sections soins et dépendance, dans l’objectif de générer des économies et de favoriser le maintien à domicile des personnes âgées.

Mais cet équilibre apparent dissimule une réalité plus fragile. Les investissements, en recul de près de 20 millions d’euros par rapport à 2022, sont désormais limités aux seuls travaux de sécurisation et de maintenance pour les routes et les collèges. Les marges de manœuvre s’amenuisent : les réserves financières, déjà entamées, continueront à être sollicitées, et un nouveau recours à l’emprunt est prévu.

Une capacité de désendettement préoccupante

Dans ces conditions, la capacité de désendettement du Département, qui était en amélioration jusqu’en 2022, pourrait atteindre un niveau préoccupant de plus de huit années fin 2025 — un signal fort d’alerte sur la soutenabilité de la trajectoire budgétaire.

Ce constat, établi par la CRC dans le cadre d’un contrôle de l’ensemble des treize départements de la région Occitanie, intervient alors que l’État et les collectivités locales discutent de leur participation au redressement des finances publiques nationales. Dans ce contexte, la situation de l’Aude illustre les tensions croissantes auxquelles sont confrontés les départements à forte composante sociale, pris en étau entre les exigences de solidarité et les contraintes budgétaires.

« Cela ne nous dédouane pas d’une discussion serrée avec le gouvernement »

« Il faut insister sur le nécessaire rééquilibrage de cette situation, plaide la présidente du Département. La chute de nos recettes, notamment les droits de mutation à titre onéreux (taxe payée chez le notaire lors de l’acquisition d’un bien immobilier ou de foncier, NDLR), combiné à la hausse des dépenses dans le secteur social dégrade les indicateurs financiers, et pire que cela, nos marges de manœuvre et nos capacités d’action. La Chambre identifie les efforts de gestion que nous mettons en place et que nous avons déjà collectivement décidé. Elle nous invite à continuer nos efforts dans les années à venir. En l’état actuel des finances des collectivités, nous savons que ceci est nécessaire. Cependant, cela ne nous dédouane pas d’une discussion serrée, au niveau national, avec le gouvernement, pour retrouver les moyens de l’autonomie et de la libre administration des collectivités, que garantit la Constitution. » Le regroupement des Départements de France travaille sur la question pour se faire entendre auprès d’un État… qui cherche aussi à redresser la barre de ses finances.

Arnaud Gauthier

Photo : Hélène Sandragné évoque la conjoncture qui pèse sur les recettes du Département. ©A.G.

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